Francois Xavier Antoine Labelle est né le 24 novembre 1833 à Sainte-Rose de Laval. Il est le fils de Antoine Labelle, cordonnier, et de Angélique Mailler (Mayer). Il fit ses premières classes dans son village. En 1844, il entre au séminaire de Sainte-Thérèse. Il y prend la soutane à l'été 1852, passe l'année 1855-1856 au Grand séminaire de Montréal où il achève ses études théologiques et sa formation cléricale. Il est ordonné prête le 1er juin 1856 dans sa paroisse natale par Mgr Pinsonnault. Il sera, par la suite, vicaire à Sault-au-Récollet et à Saint-Jacques-le-Mineur avant de devenir curé dans les paroisses de Saint-Antoine-Abbé et de Saint-Bernard de Lacolle. Il devient curé de Saint-Jérôme le 15 mai 1868 suite à sa nomination par Mgr Bourget, et il le sera jusqu'à sa mort le 4 janvier 1891. Sans négliger sa vocation sacerdotale, il consacrera sa vie aux intérêts de la terre et à la colonisation des cantons du Nord. Aussitôt devenu curé en 1859, il emmène ses parents dans son presbytère et ils le suivent lorsqu'il change de paroisse. Il perdit son père à la fin de décembre 1861. Sa mère sera la ménagère du presbytère de Saint-Jérôme jusqu'à la mort de Antoine. Elle lui survivra, mais seulement de quelques mois.
Au cours de sa deuxième cure à Saint-Bernard-de-Lacolle, le curé Labelle s'était rendu compte de l'ampleur de l'émigration des Québécois vers les États-Unis. Pour cet homme, amener les colons à s'établir dans le Nord pour y cultiver les terres incultes pourrait vaincre cet exode. Il exercera une grande influence auprès du gouvernement défendant des dossiers d'ordre religieux et économique. Le développement de sa paroisse lui tient à cœur et, pour atteindre ce but, il doit obtenir la construction d'un chemin de fer qui les rapprocherait de Montréal, de Québec et d'Ottawa et, plus tard, qui pourrait se rendre dans la région du Nord.
Il multipliera donc ses démarches et se servira des journaux pour la parution de ses lettres et discours. Il ne ménagera point ses efforts pour voir son rêve se réaliser: l'établissement d'un chemin de fer dans le Nord. Grâce à son acharnement auprès du gouvernement, la voie ferrée reliera Montréal à Saint-Jérôme le 16 septembre 1876. Ce sera son premièr grand succès dans l'œuvre de la colonisation du Nord.
Dans son projet d'enrayer le fléau de l'émigration de nos compatriotes ver les villes manufacturières des États-Unis, le curé Labelle entreprendra d'autres démarches pour ouvrir le Nord à la colonisation.
Durant plus de vingt ans, il se consacrera à l'œuvre de la colonisation qu'il chérissait. Accompagné de son inséparable Isidore Martin, il réalisera plus de quarante voyages dans le Nord pour l'établissement de différents villages, recrutera des colons et exercera des pressions auprès du gouvernement pour obtenir l'arpentage des cantons et la construction de chemins.
Des personnalités provenant de divers milieux de la société deviendront de fiers partisans de son œuvre: les politiciens Chapleau et Nantel, Arthur Buies, le curé Samuel Ouimet de Saint-Jovite et l'abbé Jean-Baptiste Proulx, pour n'en citer que quelques-uns.
Le curé Labelle incitera de nombreux colons à s'établir dans le Nord. Des routes sont ouvertes, de nombreuses paroisses sont fondées. Un chemin longtemps désiré, le "Chemin Chapleau", traverse la forêt et relie la "Chûte aux Iroquois", aujourd'hui Labelle, à Nominingue.
En 1882, le curé Labelle atteint la Lièvre. Les possibilités agricoles des vallées de la Lièvre et de la Kiamika le motiveront dans ses démarches pour y établir des colons. Après avoir pris connaissance de ses rapports, le député P.B. Benoît de Chambly s'intéressera à cette région.
Ce mouvement de colonisation connut son apogée au cours de la décennie 1874-1884. Après 1885, sa progression baisse faute de moyens financiers appropriés pour atteindre ses objectifs, rencontrant également des adversaires à cette cause, tels les puissantes compagnies forestières et certains politiciens...
Dans le but de stimuler l'immigration au pays, le gouvernement fédéral nommera le curé Labelle à la tête d'une délégation qui se rendra en Europe à partir de février jusqu'au mois d'août 1885.
En 1888, il devient sous-ministre du ministère de l'Agriculture et de la Colonisation qui avait été créé en 1887 par l'Union nationale dirigée par l'Honorable Mercier.
Pendant les deux années où il cumula les fonctions de curé et de sous-ministre, il réussit à faire disparaître les grandes réserves forestières, leur concédant cependant le droit de faire la première coupe jusqu'à ce que le colon devienne propriétaire de son lot par l'obtention des lettres patentes. Pour lui, cela ne représentait qu'une demi-victoire. Il devra également faire face à de nouvelles déceptions: sa loi sur la vente et l'administration des terres publiques qu'il avait soumise au gouvernement aurait procuré aux colons plusieurs avantages, mais suite aux pressions exercées par les compagnies forestières auprès du gouvernement, des modifications y furent apportées, amoindrissant ainsi les avantages dont auraient bénéficié les colons. Il ne réussira pas non plus à faire avancer le dossier pour la construction du chemin de fer.
Parmi les rêves que chérissait le curé Labelle, deux se réalisèrent, le parachèvement du chemin Chapleau au cours de l'année 1885, qu'il connut de son vivant, et la continuité de la ligne du chemin de fer jusqu'à Nominingue en 1904. Grâce au travail acharné du curé Génier du Rapide-de-l'Orignal, ce dernier obtient que le chemin de fer soit relié à Mont-Laurier en 1909. Jamais la petite ligne de vapeurs sur la Lièvre ne se rendit plus loin qu'au lac des Pins.
Le travail inlassable du curé Labelle, son entêtement, sa persévérance auront permis à la région du Nord de voir le jour.